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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/144

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L’ÂME QUI VIBRE


Et le long corridor, péniblement suivi ;
Et les trente degrés de l’étage gravi ;
Et le dortoir immense, où jeune fille et femme,
Rejetaient vers le ciel leurs poumons et leur âme ;
Et la garde en bonnet, qui, malgré sa bonté,
N’a pas su remplacer la sœur de charité,
La garde qui lança, de sa voix la plus calme :
« Monsieur, vous pouvez dire au revoir à madame ».
Et le départ, et ses yeux de douleur si pleins
Qu’au-dessus des lits blancs, ils pleuraient dans les miens.
Puis enfin, dans la nuit à mes chagrins propice,
Mon ombre qui rôda tout autour de l’hospice ;
Et le triste retour à la maison surtout.
Et puis, ce n’est pas tout, et puis, ce n’est pas tout :
Et le jeudi suivant, la première visite,
Si lente, si cruelle et pourtant si petite ;
Et la visite encor le dimanche d’après ;
Et la pauvre sachant très bien que je viendrais
Le premier de tous ceux ayant là des parentes,
M’attendant sur son lit, assise et grelottante.
« Tu sais, me disait-elle, en ranimant sa voix,
« Tu sais que l’on m’appelle, ici, Madame Trois,
« Car mon lit, dans le rang, regarde, est le troisième. »
Et puis elle appuyait sa tête sur la mienne.