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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/40

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L’ÂME QUI VIBRE


Et le mensonge aidant, bientôt elle est séduite.
Deux mois d’amour, l’amant s’échappe, elle est réduite
À faire travailler dix jolis petits doigts.
Comme l’on gagne peu, l’on se prive, et, parfois,
On pleure ; on chôme ; on sort le soir et puis on cède.
Le besoin : second faux-pas. Bientôt l’un succède
À l’autre. On pleure, on pleure. Oh ! le vilain métier !
Et les yeux tout mouillés on refait le quartier :
Pauvreté de la femme à peine dégradée
Qui, dans la nuit, vous semble une vierge attardée.

Lorsque le dos se courbe et que tremble la main,
Lorsque la peau se ride ainsi qu’un parchemin,
L’ancêtre pauvre est éconduit. De place en place
Il sollicite ; il le connaît l’accueil qui glace,
Le mot qui blesse et l’air qui froisse. Les cheveux
Blancs et longs, trop longs, mais non par genre. Les vœux
Qui restent sans échos, les désirs sans promesses,
Les deux sous recueillis à la fin des grand’messes,
Les hivers sous les ponts, les journaux que l’on vend,
Le pain que l’on accepte et la main que l’on tend,
Le corps las et usé qu’une bonne âme habille :
Pauvreté d’un aïeul, miséreux, sans famille.