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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/78

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L’ÂME QUI VIBRE


Si tu tiens à goûter ce soir, mon jeune maître,
Le lait de la fermière et ses lèvres peut-être. »

Tiens ! c’est vrai ! Tiens ! c’est vrai ! Je vois sur le coteau
Une maison plus blanche encor que son manteau.
Oh ! que je voudrais là passer toute ma vie,
Les doigts rivés aux doigts d’une femme jolie !
Oh ! le chien qui dormait là-bas sur le perron,
Et que le bruit des pas a fait dresser d’un bond !
Oh ! le chien qui s’ensauve en dévalant la plaine
Et qui me laisse seul ainsi qu’une âme en peine !
Si vous pouviez savoir, ô mes amis, l’orgueil
Qu’un vagabond ressent en se voyant tout seul,
En se voyant tout seul devant la maison blanche,
Seul à tendre son cœur à la nuit qui s’épanche !

Hélas ! oui, je suis seul. J’avais
Un frère autrefois, un poète.
Il partagea mes jours mauvais
Le temps que brûle une allumette.

J’en ai tant vu brûler depuis,
Qu’il doit être des monts de cendre.
Mais, pour le retrouver, je suis
Encor tout prêt à redescendre