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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/143

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vert du honteux dans cette passion fantasque et maladive, une inattendue pointe de férocité ; je l’adore, et j’aime à la voir souffrir, j’aime à lui faire du mal !

Si je te disais qu’à mon dernier départ, au moment de monter en wagon, quand je l’ai baisée longuement à travers sa voilette, cela m’a été une délicieuse sensation de fraîcheur et de brûlure de la sentir pleurer… Oh, ces deux grosses larmes, lentes, furtives et chaudes, dont la tiédeur a glissé sur mes joues, et dont nos lèvres, mêlées l’une à l’autre, se sont trouvées du même coup salées ! Ô l’amertume aimante de cet adieu !…

Je n’ai plus regretté mon départ, elle pleurait… Son chagrin à la fois me poignait et me ravissait ! la fameuse bête fauve que décagent dans l’homme le rut, cet amour intuitif, et ce rut idéalisé, poétisée déprimé, corrompu que nous appelons l’amour !

Mais je ne sais pourquoi, j’ai le pressentiment que tout cela est fini, je rentre après-demain, et j’ai une appréhension de ce retour.

Si nous allions nous aimer moins, ou autrement,