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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/208

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Regardez-le, lui aussi, svelte, mince, élancé, les formes onduleuses d’un lévrier de race… lévrier ou renard. Sur cette élégante armature de squelette, cette tête rose, imberbe, presque adolescente, Barythine a trente ans ; hein ! dites, qui le croirait. Cet éphèbe est l’ainé du marquis de Sarlys. Me direz-vous le secret de cette inquiétante jeunesse… Le moyen âge, lui, le savait. Oh ! la tête est fine, féminine même ; le nez est délicat, la bouche ciselée, mais incisive, étroite, une bouche faite pour mordre et d’un rouge de sang… Oh ! ce rouge indicateur ! Hermann Barythine vit aussi sans maîtresse, loin des salles d’escrime et des clubs : invisible le jour, cloîtré dans son splendide hôtel de la rue Bassano, où il annote à l’orgue, au piano, sur le violoncelle ses bizarres compositions. Le soir, la nuit, correct et souriant, il va recueillir de salon en salon les applaudissements et les bravos pâmés des femmes : le monde s’en est engoué ; c’est le maître à la mode. Chaque nuit, cette nuit ici, demain soir là-bas, il triomphe dans le monde remorquant à sa suite ce pauvre Sarlys, qui ne peut plus le quitter, pris au pouvoir d’un charme