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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/6

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dans l’eau pâle des quais avec des noirs et des haches d’eau-forte, l’hôtel des Neymont, morne tombeau d’antiques splendeurs déjà de mon temps disparues, où, dans la longue tristesse des dimanches, geignait un piano grêlement tapoté par les doigts d’une vierge sans dot, Mlle de Neymont, entrée depuis aux Ursulines de Caen.

Oh ! la tristesse des dimanches de province, les volets fermés et les outils au repos, le passant rare dans l’isolement léthargique des rues et tant de cloches dans l’air ! il faut avoir vécu tout enfant comme moi leur morne somnolence, à ces tristes dimanches, tristes comme un jour de Toussaint, pour en comprendre le vague et la torpeur et le charme à la fois ouaté et monotone, à la longue endormant pour les nerfs et le cœur.

La foule entassée dans les églises, où se traîne la sourde mélopée des vêpres, et, sur le quai, la promenade solitaire des douaniers de garde devant la mer remueuse et l’éternel recul de l’horizon : c’est là que mon rêve s’en retourne en souvenirs tranquilles vers un pavillon Louis XIII, entouré de grands murs, déjà très loin dans la vallée, à