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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/157

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je demande pourquoi, on me répond que c’est en vue d’une restauration ! — Restaurer cela, vraiment ? Alors je songe à cette princesse de contes de fées que de méchants Génies condamnèrent jadis à trier par espèces des monceaux de petites plumes : ensemble celles des chardonnerets, ensemble celles des pinsons ou des linottes, etc…, et à les recoller sur des corps d’oiseaux…

Et cette bombe incendiaire, tombée tout près de Saint-Marc, — heureusement sans éclater, — quelle excuse lui trouvera-t-on ?


Par faveur, on m’ouvre le Palais des Doges, ou l’on n’admet plus les visiteurs, depuis qu’il est en tenue de guerre. L’imagerie a vulgarisé ce lieu, qui est un monde de grands escaliers de marbre et d’immenses salles aux décorations prodigieuses. Mais en ce moment, ce qui est nouveau et imprévu, c’est cette sorte d’impression de la fin des temps, que l’on éprouve à se promener au milieu du silence et du désarroi de ce désert splendide. Toutes les célèbres peintures des murailles et des plafonds, signées des maîtres merveilleux de la Renaissance italienne,