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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/176

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épaisse. « Dieu punisse l’Angleterre ! » c’est ce qui se lit le plus souvent sur des pans de muraille, en grosses lettres maladroites. — La punir de quoi ? pauvres dupes du kaiser, pauvres esclaves crédules dont la bondieuserie est aussi imbécile que sacrilège, la punir de s’être si vaillamment dressée pour arrêter la rage du Monstre allemand ?

La pluie, la pluie ! Une pluie déjà si froide, sur nos ruines ! C’est bien la fin des journées douces, plus clémentes à nos chers soldats, c’est bien le quatrième hiver qui commence. Depuis ce matin, se forment partout ces cloaques de boue que nous avions oubliés et que de nouveau nous allons subir jusqu’au printemps ; sur ces routes du front, où passe un continuel cortège de camions d’une lourdeur à tout défoncer, les ornières, les trous dangereux se remplissent de cette espèce de bouillie gluante qui rejaillit en gerbes sur les costumes bleus de nos soldats ; bientôt, pauvres petits braves, ils auront repris la teinte grise de l’hiver dernier, ils auront comme des écailles, on les croira habillés avec de la terre. Dans ces camions innombrables, qui les transportent à grand