Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/260

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des nuits à songer devant la mort, nous auraient compris profondément.


Ces réflexions, je n’ose pas, il va sans dire, les laisser deviner à l’archevêque, et du reste, quand il a bien compris que je ne suis pas venu pour aborder un tel sujet qui ne me regarde pas, une plus cordiale bienveillance éclaire son visage. Nous causons alors de sa cathédrale, dont l’agonie lui déchire le cœur, et, comme je lui exprimais mon étonnement que cette dentelle de pierre, déployée en plein ciel, ait déjà résisté tant de mois à la furie des Barbares, il me répond avec un sourire :

— Une dentelle, une dentelle… Ne vous y trompez pas… C’est au moins une dentelle très solide… Sa légèreté, c’est surtout une illusion qu’elle donne, à force d’être lointaine et en l’air, pour vous qui la regardez en levant la tête. De prés, tout ce qui, vu d’en bas, semblait aérien et presque impondérable, est fait au contraire de pierres énormes et repose sur des bases vraiment cyclopéennes. Ainsi, ces voûtes, qui à vos yeux affectent là-haut la délicatesse d’une