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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/30

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disaient les irrécusables papiers de service saisis dans leurs poches, — et l’exécution méthodique du crime a été, en son ensemble, vraiment merveilleuse.

Entrer pour la première fois dans cette ville cause une poignante et inoubliable impression d’angoisse, de révolte et de stupeur. On a envie de crier et de maudire… Quel chef-d’œuvre de destruction enragée ! Nulle part certes, et à aucune époque de l’histoire, le monde n’avait connu rien d’approchant. Même l’une de nos malheureuses villes de l’Est, qui jusqu’à ce jour détenait le record du genre, n’offrait comme horreur rien de comparable. Et puis cela s’est fait d’un seul coup, cela s’est fait hier, pendant leur brillante retraite ; c’est, pour ainsi dire, une immense blessure où les chairs palpitent encore.

Les rues de la grande ville succèdent aux rues, les places succèdent aux places, et le massacre est partout pareil. Pas une maison, petite ou grande, qui n’ait été crevée du haut en bas ; elles montrent toutes leur intérieur, leurs entrailles déjà aux trois quarts épandues ; on dirait qu’elles ont toutes la