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Page:Loti - Le Mariage de Loti, 1880.djvu/84

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nus, mais les nattes criaient sous le poids de son gros corpus.

… Quand l’homme fut près de moi, il prit une moustiquaire de mousseline qu’il étendit avec soin au-dessus de ma tête ; après quoi il plaça une feuille de bananier devant sa lampe pour m’en cacher la lumière, et retourna s’asseoir, la tête appuyée sur ses deux mains.

Pomaré qui nous avait observés anxieusement tous deux, cachée dans l’embrasure sombre, sembla satisfaite de son examen et disparut…

La reine ne venait jamais dans ces quartiers de sa demeure, et son apparition, m’ayant confirmé dans cette idée que mon compagnon était inquiétant, m’ôta toute envie de dormir.

Cependant l’inconnu ne bougeait plus ; son regard était redevenu vague et atone ; il avait oublié ma présence… On entendait dans le lointain des femmes de la reine qui chantaient à deux parties un himéné des îles Pomotous. — Et puis la grosse voix du vieil Ariifaité, le prince époux, cria : « Mamou ! — (silence !) — Te hora a horou ma piti ! » — (silence, il est minuit !)… Et le silence se fit comme par enchantement…