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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/110

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marécages sablonneux où croissent les roseaux, les tamarins et les palmiers superbes éployés en panaches bleus.

On admire en passant chacun de ces jardins sauvages. Puis le petit recoin paradisiaque tout à coup nous est masqué derrière les blocs des granits énormes, et on ne voit plus, pour un temps, que les pierres polies où l’eau s’enferme, — jusqu’au moment où le miracle recommence, à quelque détour, et un autre bocage enchanté survient. Le ciel naturellement est d’une limpidité de cristal, comme un ciel d’Éden doit être. Et des oiseaux chantent dans les palmes ; des libellules tremblent, posées sur les joncs ; des reflets de soleil, malgré les roches surplombantes, se glissent et viennent danser par places au fil de l’eau remuée.



Dans un bassin profond aux parois adoucies, qui semble quelque somptueux sarcophage de roi, j’arrête ma promenade pour me baigner ; alors, levant les yeux, j’aperçois de grandes bêtes à tournure antédiluvienne, penchées tout au bord des escarpements d’en haut et me regardant, le cou tendu, d’un air d’intime connaissance : nos droma-