Aller au contenu

Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/203

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bien moins pesante que l’ancienne, et comme encore allégée ici, dans son élément qui est l’espace, l’espace profond, l’espace pareil où la vue se perd. Bêtes maigres, hommes maigres, membres affinés par les jeûnes du désert, mais musclés pourtant, membres de force et de grâce ; pattes nerveuses qui vont, qui vont toujours, malgré la faim coutumière ; jambes et bras nus, qui s’échappent des burnous pour se détendre comme des ressorts de métal bronzé ; fusils et coutelas qui se frôlent avec des cliquetis secs ; houppes de laine noire qui s’agitent et qui dansent ; cuirs tailladés serrant des tailles minces ; amulettes et pendeloques…



Conversation d’un instant avec mon chamelier nouveau :

— C’est loin, ton pays à toi ? demande-t-il.

— Oh ! oui, c’est très loin.

— C’est Beyrouth ? c’est Cham (Damas) ?

— Non, bien plus loin encore, c’est de l’autre côté de la grande mer.

Un silence, il réfléchit, puis il lève vers moi ses yeux étonnés :

— De l’autre côté de la grande mer ? Mais com-