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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/218

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me voici parti en avant de la caravane, au grand trot léger, lancé en flèche…

Bientôt rejoint, d’ailleurs, par le petit cheik Hassan, qui s’est jeté à ma poursuite, qui prétend que son dromadaire, à lui, est supérieur encore et qui veut qu’un moment je l’essaye aussi. Donc, nous changerons, pour lui faire plaisir, et nous continuons de trotter côte à côte, prenant de l’avance dans l’infini monotone, perdant de vue derrière nous la caravane plus lente.

Une brûlante journée succède au matin si sombre. Le soleil monte dans un ciel à présent tout bleu ; les lointains plats tremblent de chaleur, les lointains vides semblent se préparer pour toutes sortes de visions et de mirages…

Gazal ! Gazal ! (les gazelles !) crie le cheik Hassan, tandis que nous détalons sur les genêts tristes…

En effet, en sens inverse de notre course, elles passent comme une envolée de sable, les petites bêtes fines, les petites bêtes de vitesse et de fuite… Mais les lointains mouvants et troubles aussitôt nous déforment leurs images, les escamotent à nos yeux déroutés.

Nous marchons toujours à l’avant-garde extrême, avec des temps de trot et avec des haltes.

Vers onze heures, un premier lac irréel nous