Aller au contenu

Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123

lut à l’heure où commençait le huitième.

Baigné, rasé, coiffé, habillé, en un peu plus de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, mais aussi vite que possible, je me précipitai chez une des vingt amies intimes que je me connaissais au quartier Latin. Elle se trouvait seule par bonheur. Comme elle n’était vêtue que d’une chemise, elle eut plus tôt fait de l’enlever que moi de dénouer ma cravate. Tant que les jeunes femmes ont de jolis seins, les chemises leur pèsent.

Mais elle s’alarma de mon agitation.

« Qu’est-ce qui t’arrive ? Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que tu veux ?

— Ma petite Margot, j’ai envie de faire l’amour.

— Moi aussi. Alors !… avec des protections dans le gouvernement, on pourra peut-être coucher ensemble.

— Envie… mais à crier ! de faire l’amour par-devant, ma petite Margot ! par devant !

— Par-devant ?… mais j’espère bien !

— Par ici, tu vois ? par ici. Tu as bien compris ? Pas par là.

— Il est complètement maboul », dit Margot d’un air égaré.

Elle se rassura peu à peu, tandis que son étreinte me donnait le soulagement que j’étais venu chercher dans ses bras : le délicieux verre d’eau fraîche qui désaltère de l’alcool. Encore hanté par l’obsession de mon aventure, je tâtais de la main, je ne pouvais pas croire que cette fois, enfin… mais la simple Margot ne s’était pas trompée. Jamais elle n’a su, depuis, tout le