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Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/233

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— Oui, elle m’a foutu la main sur la gueule parce que je suis rentrée avec un godmiché dans le derrière. Que je m’en doutais même pas. »

Les débuts de Lili étaient toujours imprévus, mais délibérés. Lili dirigeait les scènes ; et de toutes les choses singulières que j’ai vues dans sa famille, c’est aujourd’hui celle qui m’étonne le moins. Ricette encore s’en étonnait pourtant et rit derrière sa main avant de reprendre :

« Tu l’as encore ? À qui est-il ?

— Est-ce que je sais ? Y a tant de salopes qui m’enculent… Et comme je leur tourne le dos, je peux pas les reconnaître. Ma mère a gueulé comme ça : « Encore une putain de gougnotte qui t’a oublié sa pine dans le cul ! » C’est pas vous, mademoiselle ?

— Moi ? c’est moi la salope qui t’encule ? c’est moi la putain de gougnotte qui…

— Oh ! moussez pas ! j’ai répondu : « C’est dans l’escalier, maman. — Ben ! qu’elle a dit, va donc chez la grue d’en face, voir si c’est pas à elle, ce godmiché-là. » Je fais un acte de probité, mademoiselle, en vous le rapportant.

— Et moi je te le renfonce ! A-t-on jamais vu des gosselines pareilles qui font des visites de cérémonie avec un godmiché dans le derrière ? et qui ne vous passent même pas la langue par-devant ?

— Non ! je m’y reconnaîtrai jamais avec toutes les espèces de gousses ! Y en a qui vous enculent ! Y en a qui vous débarbouillent avec ce qu’elles déchargent… On baise plus avec elles qu’avec les michetons…

— Comment, tu es dépucelée à ton âge ?