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Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/20

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s’en empara, il répondit aux protestations des tribuns que, la Gaule étant soumise, ce trésor était devenu inutile[1].

La guerre contre les peuples au delà des Alpes était donc, pour Rome, la conséquence d’un antagonisme séculaire qui devait amener une lutte suprême et la ruine de l’un des deux adversaires. C’est ce qui explique à la fois et l’ardeur de César et l’enthousiasme excité par ses succès. Les guerres entreprises d’accord avec le sentiment traditionnel d’un pays ont seules le privilège de remuer profondément la fibre populaire, et l’importance d’une victoire se mesure à la grandeur du désastre qu’aurait entraîné une défaite. Depuis la chute de Carthage, les conquêtes en Espagne, en Afrique, en Syrie, en Asie, en Grèce, agrandissaient la République, mais ne la consolidaient pas, et un échec dans ces différentes parties du monde aurait amoindri la puissance de Rome sans la compromettre. Avec les peuples du Nord, au contraire, son existence était en jeu, et de ses revers ou de ses succès dépendait le triomphe de la barbarie ou de la civilisation. Si César eût été vaincu par les Helvètes ou par les Germains, qui peut dire ce que Rome serait devenue, assaillie par les hordes innombrables du Nord se précipitant à l’envi sur l’Italie ?

Aussi nulle autre guerre n’excita plus vivement l’opinion publique que celle des Gaules. Pompée avait eu beau porter les aigles romaines jusqu’aux bords de la mer Caspienne et, par les tributs imposés aux vaincus, doubler les revenus de l’État, ses triomphes n’avaient obtenu que dix jours d’actions de grâces. Le sénat en décréta quinze[2], et même vingt[3], pour les victoires de César, et, en

  1. Appien, Guerres civiles, II, xli.
  2. Guerre des Gaules, II, xxxv.
  3. Guerre des Gaules, IV, xxxviii ; VII, xc.