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Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/495

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des vauriens[1] ; mais, tant que ce tribun resta fidèle à la cause du sénat, Cicéron l’honora de son estime, et fit les plus grands éloges de son caractère et de ses hautes qualités[2]. Curion s’était acquis de l’autorité par son éloquence et sa clientèle. Son père avait été l’ennemi déclaré de César, contre lequel il avait composé un livre[3], et lancé une foule de bons mots, piquants ou grossiers, qu’on répétait à Rome[4]. Héritier de ces sentiments, Curion poursuivait lui-même depuis longtemps de ses sarcasmes le vainqueur des Gaules ; mais personne n’oubliait les injures plus facilement que César, et, comme il comprenait l’importance politique de ce dangereux adversaire, il n’épargna rien pour se l’attacher.

Dès sa première jeunesse, Curion avait été étroitement lié avec Marc-Antoine. Perdus de dettes l’un et l’autre, ils avaient mené ensemble la vie la plus dissolue ; leur intimité ne s’était pas affaiblie[5]. La parenté de Marc-Antoine avec la famille Julia[6], ses relations avec Gabinius, et principalement sa conduite militaire en Égypte, l’avaient fait distinguer par César, auprès duquel il s’était retiré lorsque Gabinius fut mis en jugement[7]. César l’employa d’abord comme lieutenant, puis le choisit pour questeur, en 701. Sa bienveillance pour Marc-Antoine adoucit probablement un peu l’humeur de Curion, sa libéralité fit le reste. Il lui aurait donné, s’il faut en croire Appien, plus de 1 500 talents[8]. Il

  1. « Ingeniosissime nequam. »
  2. Cicéron à Curion, Lettres familières, II, vii.
  3. Cicéron, Brutus, lx, 218.
  4. Suétone, César, xlix.
  5. Plutarque, Antoine, ii. — Cicéron, Philippiques, II, xix, 48.
  6. Voyez sa biographie, Appendice D.
  7. Cicéron, Philippiques, II, xx, 49.
  8. Appien, Guerres civiles, II, xxvi. — Cependant Cicéron, qui ne ménageait pas ses adversaires, ne parle pas de cet acte de corruption, et Velleius Paterculus (II, xlviii) s’exprime ainsi : « Curion, comme on l’a dit, s’était-il vendu ? C’est ce que nous n’osons décider. »