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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/22

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LE MAL DES ARDENTS

— Il ne viendra pas. Tu sais bien que mes lettres n’arrivent pas à le déranger.

— Va le chercher.

— Il ne viendra pas ; il faut que tu viennes avec moi… Elle poussa un cri : « Moi ! » Les cieux tournèrent. Elle ferma les yeux et les rouvrit aussitôt ; il lui sembla que la vie venait de changer ; la menace était revenue la chargeant d’un poids infini.

— Oui, toi, disait placidement le père. Tu le connais depuis l’enfance, tu es la femme de son meilleur ami. Si tu le supplies de me sauver, il t’écoutera.

Elle fit ses bagages plus morte que vive. Mais Olivier ne voulait pas la laisser partir ; elle tremblait elle-même de le laisser sans mère, ce petit qu’elle n’avait jamais quitté. « Prenons-le donc avec nous, dit Mauléon, on peut le montrer, il n’est pas vilain ; je lui paye le voyage ». Ils partirent le lundi de Pâques après que Rabevel eut répondu à leur télégramme qu’il les attendait.

Bernard n’avait pu se dispenser d’annoncer à sa femme que Madame Régis, son fils et son père allaient venir passer quelques jours à Paris. Reine connaissait un peu François dont l’exotisme faisait vibrer en elle les cordes que les romans de Loti lui avaient révélées ; le Capitaine était, à chacun de ses voyages depuis douze ans, passé en météore et chaque fois Rabevel l’avait prié à dîner tant pour causer avec lui des détails d’exploitation de la compagnie dans le Pacifique que pour complaire à sa femme dont