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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/23

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LA FIN DE RABEVEL

il savait la faiblesse tout esthétique pour les récits des pays de la perle et du corail. Reine ne cacha pas le plaisir que lui causait la venue d’Angèle et proposa même à son mari de la recevoir chez eux : « Nous préparerons deux chambres, dit-elle ; puisque nous avons de la place chez nous, profitons-en pour donner l’hospitalité aux gens sympathiques : ils sont si rares ! » Mais Rabevel hésitait ; tout de même recevoir sous le même toit sa femme et sa maîtresse ! Bah ! songea-t-il, préjugés tout cela. Et aussitôt son esprit travaillait. Il dit, comme pensant tout à coup à un détail : « Eh ! mais, deux chambres, deux chambres, ma petite Reine, tu te trompes il en faut trois ». « Tu plaisantes, nous mettrons un lit pliant dans la chambre de Madame Régis ; un enfant de douze ans peut bien dormir dans la chambre de sa mère… »

Il ne put celer un mouvement de contrariété qui n’échappa point à Reine : « Que de pudeur ! dit-elle en riant, nous ajouterons un paravent puisque tu t’offusques ».

Elle voulut qu’ils allassent tous deux chercher leurs hôtes le mardi matin. Dès que Bernard les vit apparaître il les lui indiqua : « Les voilà, là-bas, dit-il, tu vois : la brune au chapeau gris avec le monsieur à grand feutre près du pilier, » — « Mais l’enfant ? » — « Nous ne pouvons pas le voir, il est dans la foule. Je m’en vais, je sais que les femmes n’aiment pas qu’on les aperçoive à l’arrivée d’un train de nuit, après quinze heures de voyage. Je vous rejoindrai à l’heure du déjeuner ». À la vérité, il se sentait