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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/86

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LE MAL DES ARDENTS

— Des années sans le voir…

— Et moi ?

— Toi, ce n’est pas pareil ; tu es un homme fait, tu as toujours été sérieux et fort. Ah ! que je m’inquiéterais de cet enfant quand il partirait !

— Bah ! il va partir avec moi comme mousse le mois prochain…

L’enfant battit des mains.

— Tu n’y penses pas, s’écria Angèle. Comme mousse, le mois prochain ! Ce petit qui n’a que treize ans !

— C’est l’âge, dit Rabevel. Je dois même dire que la plupart des mousses qui s’embarquent sur nos voiliers ont moins de douze ans.

— Tu vois, fit François, je ne le lui fais pas dire. D’ailleurs, voyons, raisonnablement, que risquera ton Olivier avec son père ?

— Voyons, François, ne songes-tu pas que cet enfant aura des camarades, qu’il ne sera pas constamment avec toi, que les matelots dans les ports…

— Il est bien jeune pour penser à ce que tu penses. Et quant à cela, tu es bien comme toutes les mères ; quand l’instant sera venu, ma pauvre Angèle, il faudra en faire ton deuil. Le Père Régard lui-même qui était, au dire de ces Messieurs, un être extraordinaire, n’en a point sauvé Bernard… Ne t’inquiète donc pas de ton fils. Il sera comme un coq en pâte. Il grandira, forcira, deviendra audacieux et solide. Et puis, tu sais, dans un bateau, il y