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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/116

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LE MAL DES ARDENTS

— Quel métier ! dit Bernard. Qui est avec elle ?

— L’auteur, René Bardy et sa maîtresse, Esmeralda ; le vieux, derrière eux, qui vient d’entrer, c’est Ezechiel, le directeur du théâtre.

Le rideau tombait sur la dernière réplique du premier acte. Bernard contemplait la courtisane. Encore une fois sans qu’il la désirât mais avec une violence prodigieuse il eut l’envie de la serrer dans ses bras à lui faire craquer les os puis de la jeter à terre comme une poupée ; il se vengeait obscurément de Mulot, des difficultés, des travaux de son existence et de son échec possible dans la lutte où il était maintenant engagé.

— Veux-tu que je te présente tout de suite ? demanda Ramon qui suivait son regard.

— Comme tu voudras, répondit-il ; seulement pas sous mon nom, hein ? Je serai un de tes compatriotes si tu veux, un senor Marquis del Vomito-Negro par exemple ! Tu comprends, comme je ne la reverrai jamais, ça n’a pas d’importance et cela fait très bien.

Il pensait que, peut-être, Mulot avait, au cours de la conversation, parlé de ses démêlés avec lui et il ne voulait pas éveiller la méfiance de la demi-mondaine.

— Soit ; tu seras mon cousin, Luis de Calenda. Allons.

Ils firent le tour de la salle et frappèrent à la porte de l’avant-scène. Une dizaine de personnes s’y pressaient et ils eurent quelque peine à approcher la déesse :

— Ah ! vous voilà, Ramon, dit-elle en l’enveloppant de