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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome I (1923, NRF).djvu/148

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LE MAL DES ARDENTS

— Oui, je le prétends, là. Que croyez-vous donc être, vous ?

Il laissa tomber les bras avec désespoir. Hélas ! la perdre, allait-il la perdre ! Tout plutôt que cela.

— Admettons, dit-il, que vous disiez vrai. Êtes-vous sûre qu’il vous aime, lui ?

— Oui, répondit-elle violemment ; François est l’honnêteté même et je n’en dirais pas autant de vous. Rappelez-vous que je vous connais depuis des années tous les deux.

— Et si je vous disais, moi, que, cette nuit encore, François était entre les bras d’une autre femme ? qu’il ne se marie que pour plaire à son père ? que, tandis que vous l’attendrez il s’est bien juré de mener la vie qu’il lui plairait et d’entasser ses conquêtes de rencontre ? Tenez, il y a quelques jours encore, il me disait : Angèle sera assez bonne pour soigner mes rhumatismes, moi je vais profiter de la vie !

Elle se boucha les oreilles et lui cria avec horreur :

— Ce n’est pas vrai, ce n’est pas vrai !

Mais il était déchaîné ; il continua, dénigrant son ami, inventant les pires calomnies, déformant les moindres faits pour peu qu’il y vit germe d’équivoque et parlant avec une passion si évidente qu’elle était doublement bouleversée par la déchéance qu’on lui annonçait et l’épanouissement d’un nouvel amour si longuement désiré.

— Enfin, disait Bernard au paroxysme, vous avez dû vous apercevoir vous-même de la tiédeur de François ;