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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/117

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la Pucelle, cette insulte à l’héroïsme d’une sainte. Quant aux rois, on avait admis désormais que le trépas brisait leurs autels ; Louis XVI était averti : on attendait son trépas. Quant à la noblesse, il était reconnu qu’elle se donnait la peine de naître, voilà tout, et qu’après, elle n’était bonne qu’a séduire des soubrettes ; quant aux prêtres, il était prouvé que notre crédulité faisait toute la science de Bossuet, de Fléchier et de Massillon ; quant aux femmes, il était publié par toutes les bouches que leurs instincts d’animaux les obligeaient à tromper ; enfin, quant à Dieu, il était démontré, selon Uranie, qu’à Jérusalem, Jésus-Christ avait exercé le vil métier d’ouvrier, et qu’il avait perdu ses beaux jours dans ce lâche exercice. Tous ces décrets, faciles à la mémoire, étaient popularisés par Figaro sur les ruines des autels des rois.

» Avec ces maximes courant les rues, essayez de combler un déficit, de conquérir les Indes et de reconstituer une société ! Que pouvait-il faire, Louis XVI, contre cette opposition organisée par les princes, la cour et la ville ? Il était seul contre tous ! L’histoire s’est montrée bien injuste envers ce grand roi ; son nom a toujours été précédé de l’épithète faible chaque historien a copié son devancier. La faiblesse de Louis XVI est passée en proverbe. L’histoire réfléchit rarement ; elle imite. Oui, il était faible ce roi qui a créé une marine formidable ; qui a mis en mer six amiraux de génie ; qui a soulevé l’Amérique ; qui a ouvert un chemin dans les airs avec Montgolfier ; qui a donné la solitude à la Bastille ; qui a aboli les lettres de cachet et la torture ; qui a rendu la vie au peuple avec Parmentier ; qui a découvert le grand chemin du monde avec Lapeyrouse ; qui a reconquis l’Inde avec de Suffren ;