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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/158

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nes, à se trouver au chantier de la pagode, le lendemain au lever du soleil !

Ce lever était aussi, ce même jour, impatiemment attendu par le prince Zeb-Sing ; jamais nuit ne lui avait paru plus longue. Il tenait le merveilleux diamant au bout de ses deux doigts, et regardait le sommet de la montagne orientale de Ni-Kiou. L’astre se leva, et le prince plongea ses regards dans les horizons infinis qui jaillirent au même instant des étincelles de Beabib.

Ce phénomène d’optique, qui était la vertu de Beabib, s’expliquera facilement ou paraîtra, peut-être, moins surnaturel, si on le compare au mirage égyptien, avec lequel il a beaucoup de rapports. Les vastes déserts de l’Éthiopie et de l’Abyssinie renferment des oasis solitaires pleines d’ombres et d’eaux vives. Ces bois de palmiers et de sycomores, entourés de déserts brûlants, se reflètent dans la nue, comme dans un miroir, lorsque certaines conditions atmosphériques arrivent et retombent de la nue en décrivant une courbe infinie sur l’horizon d’un autre désert lointain, où le phénomène du mirage s’accomplit.

L’éblouissement dont fut saisi le prince produisit, cette première fois, un effet incroyable. Son regard plongea dans un monde nouveau et infini, où d’abord tourbillonnaient confusément toutes les couleurs et les nuances que le soleil cristallise dans le flanc des roches, comme un alchimiste dans un creuset.

Zeb-Sing croyait voir rouler en fusion comme des fleuves toutes les étoiles du ciel, puis tout à coup, cette lumière torrentielle s’arrêtait, et d’immenses horizons de jaspe, d’éme-