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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/175

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wood, si vous voulez me tuer, l’occasion est belle ; nous sommes seuls ; voilà ma poitrine découverte ; je suis votre ennemi, par la haine de mes pères, frappez.

Il y a de brusques et inexplicables revirements dans le cœur des hommes ; Augustus Hartwood laissa glisser sa main sur son arme, comme s’il n’eût voulu que la caresser, et il accueillit par un sourire les paroles de Killy. L’ouragan de colère qui grondait dans le cœur du sauvage Écossais se calma subitement comme la tempête qui tombe avec le soleil qui se couche ; il tendit la main à Killy et lui dit avec douceur :

— Si vous ne veniez pas vous battre avec moi, ou m’assassiner, que veniez-vous donc faire ici avec ce manteau de vos aïeux, que le jour n’a pas vu depuis trois siècles au moins ?

— Augustus Hartwood, dit Killy, je me suis paré de ce manteau, pour me présenter devant vous avec les pensées de mes aïeux ; ils m’ont parlé dans leur tombe ; vous les voyez, en me voyant ; vous les écoutez, en m’écoutant ; je suis eux, ils sont moi. Je viens donc, comme un Highlander des anciens jours, vous dire que toute guerre est mauvaise, et qu’il n’y a de bon sur la terre que la paix ; acceptez-vous la paix ?

Augustus Hartwood sourit, et fit un mouvement de bonhomie qui était le prélude d’un traité de paix entre les deux familles.

— Que le diable me caresse ! dit-il, cela m’est égal ! je manque peut-être à de vieux serments. Les morts s’en consoleront ; c’est aux vivants à arranger les affaires de famille. Les morts ont tort comme les absents ; j’accepte la paix ;