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Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/177

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— Mon ami, — dit la jeune fille à Killy, la veille de ses noces, — c’est à ma topaze que nous devons notre union et notre bonheur.

— Oui, Katrina, dit Killy, vous avez raison ; j’ai remarqué comme vous ce concours de circonstances heureuses qui remontent à la topaze et qui m’ont amené ici, pour la première fois, chez votre père ; mais il me reste un regret ; j’aurais bien voulu faire l’essai de la vertu de votre topaze sur une de ces bonnes tempêtes, comme j’en ai tant vu sur le lac.

— Killy, — dit Katrina en souriant, — cette vertu n’est pas menteuse, croyez-le bien ; la sagesse des femmes d’Écosse ne peut se tromper dans l’étude des mystères de la nature. Une tempête sur le lac, ce n’est rien, ce n’est que du vent ; mais un orage dans le cœur de l’homme, c’est beaucoup, c’est la haine. Ma topaze a bien plus fait que la chose prédite ; elle a calmé, elle a éteint la haine de mon père ; que demandez-vous de plus ?

— Rien, Katrina, dit Killy, rien que l’éternité de votre amour.

— C’est bien peu, dit Katrina ; vous l’aurez.

Le sage-brahmane Kosrou, ayant écouté ce récit, tomba en réflexion, et, secouant la tête avec un sourire triste, il répondit :

— Oui, j’ai entendu dire par ceux qui ont beaucoup vu, qu’il y a en effet des pays où l’homme passe sa vie dans des atmosphères de brouillards, de pluie et de neige, sans jamais voir le bleu du firmament, et l’or du soleil… Mon fils,