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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/129

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DU VOIR-DIT.

Ma dame m’eſcript doucement
Qu’elle deſiroit durement
Que je par devers li alaiſſe,
Et que ma neuſvaine laiſſaſſe :
Mais ce pas ne me commandoit.
Toute voie elle me mandoit,
Et je tenoie vraiement
Sa parole à commandement.
Si me parti & m’en alay,
Et fis tant que véue l’ay.
Mais ainſois que je la véiſſe
Ne que parole li déiſſe,
Se Dieus me doinſt benéyſſon,
Je n’os onques ſi grant friſſon,
Si grant paour, ne ſi grant doubte.
Car la char me fremiſſoit toute,
Et la cauſe je ne ſavoie,
Fors tant que véoir la devoie.
Si appellay mon ſecretaire
Et li deſcouvri mon affaire,
Coment fort eſtoie entrepris
Et du mal amoureus eſpris.
Si diſt que je me confortaſſe,
Et que de riens ne me doubtaſſe ;
Qu’elle ne me morderoit pas :
S’i m’en aloie pas à pas.
Mais mon cuer & mon corps enſemble
Trembloient plus que fueille en tremble
Je ne met pas icy ſa lettre,
Que ce ſeroit trop long à mettre
De ſi petitettes lettrelles,
Jàſoit ce qu’elles ſoient belles ;
Qu’à li tous les jours envoioie,