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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/142

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[vers 2027]
LE LIVRE

Et diſt : « Dous amis, es-tu là ?
« As-tu eſté bien laidengiés,
« Et de joie bien eſtrangiés,
« Pour la plus belle du pays ?
« Et pour ce qu’es trop esbahis,[1]
« Toutes les fois que tu la vois.
« Car tu n’as maniere ne vois
« Dont tu puiſſes à li parler.
« Dous amis, laiſſe tout aler
« Si fais parlers, & ne t’en chaille.
« Conforte-toi, vaille que vaille :
« Ta dame eſt ſage & prevenant,
« Et ſi t’a bien dit, cy devant,
« Que tu dois eſtre tous féurs
« Qu’elle t’aime, & c’eſt tes éurs
« Qu’elle, pour riens ne le diroit
« S’il n’eſtoit, & n’en mentiroit ;
« Si que, dous amis, ne t’eſmaie,
« Se tu as l’amoureuſe plaie.
« Elle te voit parmi le cuer,
« Si ne dois penſer, à nul fuer,
« Qu’elle jamais laiſſier te doie ;
« Car tu es ſiens & elle eſt toie.
« Et ſi, li as bien oÿ dire
« Qu’elle vuet eſtre ton dous mire,
« Et que jamais ne te laira ;
« Et certes, jà n’en mentira.

« Cuide-tu, ſe Dieus te doinſt joie,
« Que bonne dame le resjoie,

  1. Et c’eſt parce que tu es trop interdit.