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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/247

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DU VOIR-DIT.

Que je l’entroublie ne laiſſe.
Tous ſiens ſuis ſans departement,
N’il ne porroit eſtre autrement.
Ainſi j’ay eſperance qu’elle
Vuet moult bien quant ami m’appelle,
Et, de ſon bon, claime chaſcun
Ami, ne n’en aimme adès qu’un.
Et ſa reſponſe le m’enſeingne,
Avoir n’en quiers nulle autre enſeingne.
Vés-là ci, je la vous liray,
Que jà mot n’i oublieray.


XXVI. — Mon dous cuer, ma douce amour & mon tres-chier ami, plaiſe vous à ſavoir que, la merci Dieu & la voſtre ! je ſuis en tres-bon point de corps & de cuer auſſi ; car je le ſay en ſi plaiſant & ſi dous demour, que il ne porroit nul mal avoir ; tant que il ſoit par devers vous. Car, par Dieu, il i eſt à toute heure & ſera toute ma vie. Et quant je m’aviſe que je l’ay ſi tres-bien hebergié que je porroie ne voldroie mieus, il n’eſt nuls maus que li corps puiſt avoir. Et ainſi comme je ſay que li voſtres cuers eſt tous par devers moy & que vous vous tenés ſeurs de m’amour, & que vous eſtes en joie & en revel, j’en ay tel joie que je ne le porroie dire ; car certes je ne porroie avoir joie ne aiſe tant comme je vous ſentiſſe à meſchief. Mon dous cuer, j’ay receu vos lettres enqueles vous me faites aſſavoir que pluiſeurs grans ſigneurs ſcevent les amours de vous & de moy, & que il vous ont mandé que vous leur envoiez de vos choſes & des moies. Si me plaiſt tres-bien que vous leur en aiés envoié, car je vueil bien que Dieu & tout le monde ſache que je vous aime & ay plus chier que homme qui au jour de hui vive. Et ſi, me tien à mieus parée & à plus honnourèe de voſtre amour, que de roi ne de prince qui ſoit en monde. Car, à mon gré, il n’a femme en monde mieus aſſenée d’ami que je ſuis; de quoy je loe Dieu, Amour & Venus,