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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/267

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DU VOIR-DIT.

Toute ma joie me toloit.
Car il m’aminiſtroit penſées
Diverſes & deſordenées,
Qui eſtoient entortillies
De courrous & merencolies.
Et pour ice trop me doubtoie
Que celle qu’aim, où que je ſoie,
De ſi vrai cuer, tout en appert,
En lieu de bleu ne veſtit vert.
Si qu’en ce penſer où j’eſtoie
Droitement d’anui ſommilloie,
Et en ceſt anui m’endormi,
Qui ne fu pas trop bon pour mi.
Qu’en dormant un ſonge ſonjay,
Et véu dedens mon ſonge ay,
Qu’en aourant ma douce ymage,
Son chief tournoit & ſon viſage ;
Ne regarder ne me daignoit,
Dont mes cuers trop fort ſe plaingnoit :
Et tout eſtoit de vert veſtie,
Qui nouvelleté ſignifie.
Adont me ſouvint des ymages
Qu’avoit fait Virgiles li ſages,
Qui aus Rommains le chief tournoient
Quant leurs ſubjés ſe reveloient.[1]
Comment qu’en moy ſubjection
Fuſt ſans nulle rebellion,
Et qu’en rien n’avoie meſpris

  1. Voyez les poëmes de Cléomades, le Dolopathos, & les Fais merveilleus de Virgile. — Le pauvre amoureux, n’ayant rien à raconter de nouveau ſur ſes amours, continue pourtant ſon poëme, mais en ſe jetant dans des digreſſions que Peronnelle dut lire avec plus de profit que nous ne pouvons en recueillir.