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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/291

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DU VOIR-DIT.

Car ſanz ceſſer, en recoy,
De celui cui ſui amie
Regrete la compaignie.
Car je ne dors ne ne veil,
Se n’eſt en penſant à ſoy,
À ſon maintieng ſans orgueil,
À ſon gracieux arroy :
Et de ſon dous esbanoy,
Souvent, à ſace mouillie,
Regrete la compaignie.

Je delivray ſon meſſagier
Le lendemain après mengier ;
Maiz de ma grant adverſité
Que j’ay ci-devant recité,
Avoie geté une lettre
Que je li voloie tramettre ;
Si l’encloÿ en ces preſentes.
Dont j’os de penſées dolentes
Plus d’un millier, ſe Dieus me gart ;
Car ma dame au plaiſant regart
Un petit ſe courſa à my,
Dont je dy pluſieurs ſoiz : aimy !
Et ſi, n’y avoit ſeel ne cire,[1]
N’il n’avoit en moy courroux, n’ire,
Quant je li mis ; mais bien vouloie
Qu’elle ſcéuſt qu’eſté avoie
À meſchief, pour l’amour de li ;
Dont j’eus le cuer taint & pali,
Qu’elle me reſcript durement,
Rudement & diverſement :

  1. Il n’avoit ſcellé ni fermé cette lettre, comme pour laiſſer entendre à Peronne qu’elle n’y trouveroit pas ſa dernière penſée. — Je n’avois plus de reſſentiment quand je la joignis à l’autre.