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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/329

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DU VOIR-DIT.

Car en véant ſa biauté, ſa façon,
Et ſon maintieng qui de douceur ſeuronde,
J’y preng aſſez bien pour devenir bon,
Car le grant bien de li en moy redonde,
Par grace de fine amour,
Qui me contraint à haïr deshonnour
Et tout vice : ſi puis dire, par m’ame,
Je voy aſſez puis que je voy ma dame.

Véoir ne quier la dorée toiſon,
Ne les Indes, ne de Rouge mer l’onde,
N’aus infernaus penre guerre ou tenſon,
Pour eſlongier le regart de la blonde
Dont me vient joie & baudour,
Et dous penſer. Mais tieng pour le millour
Qu’à tout compter & bien peſer à drame,
Je voy aſſez puis que je voy ma dame.

RESPONSE G. DE MACHAUT.

Ne quier véoir la biauté d’Abſalon,
Ne d’Ulixés le ſens & la faconde,
Ne eſprouver la force de Sanſon,
Ne regarder que Dalila le tonde.
Ne cure n’ay, par nul tour,
Des yeux Argus, ne de joie gringnour,
Car Plaiſance ay & ſans aïde d’ame,
Je voy aſſez, puis que je voy ma dame.

De l’image que fiſt Pymalion
Elle n’avoit pareille ne ſeconde,
Mais la belle qui m’a en ſa priſon
c. mille fois eſt plus belle & plus monde[1].
C’eſt uns drois fluns de douçour
Qui puet aſſez garir toute doulour.

    Regles de la ſeconde rhetorique ne le nomme pas parmi les poëtes qui floriſſoient en ce temps-là.

  1. Monde, pure.