Aller au contenu

Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xviii
NOTICE

mande à mettre le monde dans la confidence de ſes amours. C’eſt elle en effet qui fit à Guillaume une loi d’écrire le Voir-Dit. La tâche étoit aſſez délicate, & Guillaume, embarraſſé d’un rôle qui ne convenoit plus à ſon âge, eût préféré cacher ſon bonheur à tous les yeux : mais la demoiſelle fut inflexible ; entraînée, je le ſuppoſe, & par l’exemple d’Héloïſe, & par la gloire qui venoit de rejaillir ſur la belle & noble dame aimée du florentin Pétrarque.

Et quelle étoit donc cette jeune ambitieuſe, ſi fière de ſes foibleſſes & de ſes chutes ? Je l’ai déjà nommée, j’ai déjà parlé de ſa famille ; on attend maintenant les preuves de ce que j’ai avancé. Diſons d’abord ce qu’elle n’étoit pas. Dans un long mémoire d’aſſez peu de valeur,[1] M. de Caylus n’avoit pas héſité à la reconnoître dans Agnès d’Évreux, ſœur du roi de Navarre Charles le Mauvais, mariée en 1349 à Gaſton Phébus, comte de Foix. « On voit, dit-il, par l’énigme ou logogryphe que Machaut met dans preſque toutes les pièces de ſa compoſition & qu’à la vérité il varie, que le Voir-Dit eſt adreſſé à Agnès de Navarre, femme de Phébus, comte de Foix… Je conviens qu’elle n’eſt point nommée ; mais tout la déſigne en-

  1. Mémoires de l’Académie des Inſcriptions & Belles-lettres. Mémoire ſur Guillaume de Machaut, t. XX, p. 417.