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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/340

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[vers 6960]
LE LIVRE

« Encor y a une grant doubte,
« Souvent vous prent ou pié la goute,
« Si que, ſire, s’elle venoit,
« Et en voſtre pié vous prenoit,
« S’en un povre lieu demouriez,
« Par m’ame, ſire, vous morriez.
« Et que diroit voſtres bons freres,
« Qui vous eſt fils, ſires & pere,
« Qui ſi doulcement vous norrit,[1]
« Que chaſeuns hons de joie en rit ;
« Et auſſi tuit voſtre autre amy ?
« Il ſeroient my annemy,
« Et diroient : il nous a mort
« No chier amy, & mis à mort.
« S’en ſeroie deshounourez,
« Mains priſiez & mains honorez,
« Et maudis en pluſeurs païs,
« Et de .xxm. hommes haÿs.
« Or me gart Dieus que je n’encharge
« Si grant fardel ne ſi grant charge,
« Com d’aler en vo compaignie,
« Voire en peril de voſtre vie !
« Qu’en autre cas ne vous faurroie,[2]
« Nés qu’Hettor fiſt à ceus de Troie.

« Mais ſe Circé l’enchantereſſe

  1. Guillaume étoit donc bien moins âgé que ce frère qui l’avoit élevé.
  2. Rien de plus à propos juſqu’ici que le diſcours du ſecrétaire ; mais il faut que pour l’amuſement & l’inſtruction de Peronne, Machaut ait couſu à ces premières remontrances les hiſtoires qu’on va lire, & qui amèneront l’intervention du duc de Normandie. Ces hiſtoires, tout à fait hors de propos, ſonnoient bien apparemment à l’oreille de la jeune Peronnelle, qui n’avoit pas lu ſans doute le charmant livre des Métamorphoſes.