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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/370

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LE LIVRE

cuer, quant à ce que vous me mandez que vous eſtes où vous ſavez & que je vous puis aler veoir quant il me plaira, & auſſi de l’ordenance que vous en avez fait, qui moult me plaiſt, (car, par ce, voy-je clerement que vous avez vray cuer & bonne volenté par devers moy), je vous en merci tant humblement come je puis, & non mie tant come je doy. Si ay mandé mon ſecretaire, & me trairay pardevers vous le plus toſt que je pourray, la ſaint Andrieu paſſée, ou plus toſt ſe je puis ; car li conſeil ſe remuent aucunes fois. Et n’y menray que trois de mes vallés avec mon ſecretaire, ſe avoir le puis. Mon tres-dous cuer, je ſavoie bien que vous aviez pooir d’endormir Argus & d’empriſonner Dangier & Malebouche ; &, par m’ame, j’ay grant joie de ce qu’il ſont en ce point. Si, vous prie chierement que juſques à tant que je vous aray véue, il ne ſe partent de ceſt eſtat ; &, ſitoſt come je ſeray partie de vous,[App. LXXXI.] qu’il ſoient delivre & facent leur office de vous garder encontre tous. Et, mon tres-dous cuer, ne vous doubtez que quant je ſeray venus à vous, qui ſera bien toſt, ſe Dieu plaiſt & je puis, je ſeray ſaigement & ſecretement ce que vous m’avez mandé ; & dou ſeurplus m’atendray à voſtre noble cuer. Recommandez-moy tres-humblement, s’il vous plaiſt, à la Colombelle ; car je la deſire moult à veoir pour l’amour de vous. Et ſachiez que là où vous eſtes, je n’y cognois perſonne fors vous ; ſt convient bien, quant je y ſeray, que je vive à voſtre ordenance. Recommandez-moy à H., quant vous le verrez. Et certes, ſe il me povoit venir querre je ſeroie honnorez & ſi ſeroit moult la pais de mon frere ; qu’il ne puet avoir bien ne joie tant come je ſoie hors. Je vous avoie fait faire aucune choſe à Paris ; mais on m’a dit que li orfevres eſt mors : ſt croy que je aray perdu ma beſongne & mon or. Mon tres-dous cuer, vous m’eſcrivez moult ouvertement, & avez tousjours eſcript ; ſi ne ſcay s’il eſt bon que je mette vos lettres en mon livre tout ainſi come elles ſont. Si m’en vueilliez mander voſtre volenté. À Dieu, mon tres-dous cuer qui vous doint bon-