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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/390

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[vers 8255]
LE LIVRE

En premier cercle avoit eſcript,[1]
D’or fin en latin, ceſt eſcript :

FORTUNE.

« J’afflue & me depars ſans bonne[2],
« Tels eſt li geus où je me donne. »

En ſecont cercle eſcript eſtoit
Un mot qui grant gloſe portoit :

Chierie ſuis, tant com je dure,
Et à la mort, amere & dure.[3]

Au tiers cercle avoit .i. notable
Qu’on ne doit pas tenir à fable :

La penſée avugle & enorte
Que d’amer ſon dieu ſe deporte,[4]
Et c’eſt tout que dois Dieu amer,
Qui forma ciel & terre & mer.

En quart cercle un eſcript avoit
Dont chaſeuns garder ſe devoit :

Je chante & m’esbat fauſſement,
Ma chanſon deçoit, fauſſe & ment.[5]

  1. Les manuſcrits reproduiſent l’image ici décrite de la déeſſe Fortune. Autour du grand cercle on lit : Affluo, diſcedo, talis ludus cui me do.
  2. Sans bornes.
  3. Vivens ſum cara ; dum mors accedit amara.
  4. C’eſt-à-dire : J’aveugle la penſée & je l’exhorte à ceſſer d’aimer ſon dieu. Excæco mentem, ne diligat omnipotentem.
  5. Ludo, compſallo, deludens carmine ſallo.