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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/463

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NOTES ET CORRECTIONS.

Et ſi, voy bien qu’il vit à grant doulour,
Dont il a taint ſon viz & ſa coulour.
Et vraiement moult volentiers querroie,
À mon honor, ſon bien, ſa paix, ſa joie.

La ſeconde choſe eſt qu’il n’affiert mie
Que, de ma bouche ou par ſemblant li die
Que mes cuers eſt tous ſiens, où que je ſoie ;
Qu’en ce faiſant, contre m’onneur feroie.
Et jà ſoit ce que mon cuer grief mal porte
Pour lui amer, mieus vourroie eſtre morte
Que de bonté, par regart ou par chiere,
Lui déiſſe que ſuis ſa mie chiere,
Et qu’en mon cuer porte celeément
L’amour de lui, trop plus couvertement
Que li charbons n’eſt par deſſous la cendre.
Et ne m’en puis, ne ſçay ne veul deffendre.

Si ne voy goûte en moy n’en ſon affaire :
Car il nous faut & l’un & l’autre taire,
Et tout adés plus fort riens amerons
Que jà ſemblant ne chiere n’en ferons.
Et que pourra ceſt amour devenir,
Nous en lairons bonne Amour convenir,
Pitié, Franchiſe & Douçour la courtoiſe
Qui ſevent bien que telle choſe poiſe ;
Et ſagement & toſt porvoieront
Quant, en ce point, pour amer nous verront.
Mais jà par moy ceſte amour ne faura,
Tant que Pitié ou Amour li dira.


Cette balade eſt irrégulière, elle n’a pas le refrain exigé, les rimes des trois couplets ne ſont pas uniformes. Mais malgré un certain embarras d’expreſſion, elle eſt dictée par un ſentiment paſſionné que la nouvelle épouſe ne pouvoit encore étouffer. Écoutons maintenant Machaut :


Se je vous aim de fin loial courage,
Et ay amé & ameray toudis,
Et vous avés prins autre en mariage,
Doy-je pour ce de vous eſtre en ſus mis,
Et de tous poins en oubly ?
Certes nenil, car puis que j’ay en my