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LA LUXURE DE GRENADE

petit escalier qui montait vers sa chambre à coucher.

Il allait crier :

— Guzman !

Mais il se rappela que son serviteur qui couchait au-dessus de la galerie dominant le patio lui avait demandé la permission d’aller voir sa mère à quelques lieues de Séville et ne rentrerait que le lendemain.

Puis à quoi Guzman aurait-il bien pu lui servir ? C’était la trop grande chaleur qui agissait sur ses nerfs. Il avait trop lu peut-être ce Guide des égarés de Maïmonide dont un grand manuscrit in-folio écrit en arabe était ouvert sur sa table.

Il retraversa le patio et il s’arrêta, béant, retenant son souffle.

Comme une lame le traversant, comme un suaire glacé recouvrant son corps, palpable et muette, hallucinante et invisible, la terreur venait de l’étreindre.

Tout était silencieux. Une feuille d’un des lauriers qui entouraient le bassin placé au milieu du patio se détacha avec un tout petit bruit triste et tomba dans l’eau. Almazan eut envie de pousser un hurlement pour rompre cette sorte d’enchantement d’épouvante qui l’enveloppait. Mais sa voix s’arrêta dans sa gorge.

— C’est en pareil cas que la prière est utile à ceux qui croient, songea-t-il.

Sa raison se révolta. Il fit un grand effort de volonté. Il se souvenait des paroles de son maître et bienfaiteur l’archevêque de Tolède, Alfonso Carrillo.

— Il y a parfois des puissances cachées qui se li-