Aller au contenu

Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/115

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
113
LA LUXURE DE GRENADE

jetaient des lueurs également incomparables et leur éclat fit deviner à Almazan qu’il était en présence de la princesse Khadidja.

Elle avait éprouvé un grand chagrin quand elle avait trouvé sur sa fenêtre le petit cadavre d’un rossignol et elle avait accru ce chagrin de l’apport de ses chimériques scrupules.

D’après elle, le rossignol n’aurait volé dans le magnolia où il chantait, que pour lui plaire. Il avait trouvé à son intention de nouvelles harmonies. Quand il avait senti qu’il mourait, il était venu frapper de petits coups de bec contre le volet de sa fenêtre. Mais elle, créature grossière, dormait d’un lourd sommeil et n’avait rien entendu. Elle s’accusait d’ingratitude. Elle souffrait de remords.

Elle avait attaché une énorme émeraude au cou de l’oiseau et elle l’avait enterré secrètement devant un cyprès nain, non loin de la Fontaine des lauriers. Et chaque nuit, à l’heure où, pensait-elle, l’oiseau avait souffert de son abandon elle venait chanter pour expier, un petit poème de sa composition en s’accompagnant sur la darboukah.

Almazan avait entendu parler des fantaisies de Khadidja et il s’engageait déjà dans une allée oblique quand elle se leva tout à coup et s’avança vers lui. Ses traits reflétaient à la fois le mécontentement et la tristesse. Elle parla, sans laisser à Almazan le temps de s’excuser de sa présence.