Aller au contenu

Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
129
LA LUXURE DE GRENADE

— Annoncez à votre souverain que notre hôtel des monnaies ne bat plus que des lames de cimeterres et des fers de lance.

Puis il détourna la tête et fixa un point dans l’espace pour faire comprendre que l’audience avait pris fin.

Don Juan de Vera, dont l’esprit était peu prompt à la réplique, resta quelques secondes immobile, puis tourna les talons et s’éloigna avec calme, jetant à droite et à gauche des regards de feu afin de suppléer à l’absence de réponse orale et de faire comprendre qu’une telle injure serait bientôt vengée.

Ainsi, pour faire sourire un visage de femme derrière une fenêtre grillagée, la guerre venait d’être virtuellement déclarée.

Le bruit courait dans tout l’Islam que le royaume des Maures était invincible à cause du fabuleux trésor amassé par ses rois, trésor si grand que ni celui de Gengis Khan, ni celui de Soliman, ni les richesses de la République de Venise ne pouvaient lui être comparés. Ce trésor permettait indéfiniment d’acheter des navires aux Turcs et aux pirates Barbaresques, des armes aux Génois et aux Français, de lever au Maroc et à Alger des armées de mercenaires.

L’existence de ce trésor était connue de tous les Maures d’Espagne. Ils se reposaient sur cette richesse dont ils ne jouissaient pas, mais par laquelle ils étaient occultement protégés et, quelle que soit sa misère, le