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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/156

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LA LUXURE DE GRENADE

Almazan frissonna tant étaient sinistres cette grande bâtisse de pierre et ces malades étalés au milieu des flaques qui luisaient.

Au haut d’un long escalier tortueux qui, dans des guerres passées, avait dû servir à des guetteurs et à des archers, ils poussèrent une porte et ils se trouvèrent, dans une salle qui ressemblait à un tombeau égyptien, en présence de Soleïman.

Assis, les jambes croisées, il pleurait. Il ne fit pas un mouvement. Seulement ses paupières se soulevèrent deux ou trois fois et un léger signe de son doigt gonflé pria les visiteurs d’attendre en silence.

Rosenkreutz prit place à côté de lui. Almazan, se tint un peu à l’écart. À la fin Soleïman parla, mais il s’adressait plus à lui-même qu’à celui qui était près de lui.

— Khadidja ! La princesse Khadidja ! Ils ont prétendu tous trois que c’était elle, qu’elle était sortie de son tombeau et ils faisaient claquer leurs dents branlantes et ils tremblaient encore de désir ! Mais l’autre était une pauvre jeune fille qu’un navire barbaresque avait enlevée à Corfou… L’autre était une chrétienne et elle est morte ! Comment serait-ce la princesse Khadidja ?

Almazan, entendant ces paroles incompréhensibles, se rapprocha.

Des larmes coulaient toujours sur le visage de Soleïman. Il sortit pourtant de sa méditation, il essuya son visage et il se tourna vers Rosenkreutz en murmurant :

— Comme l’a dit le poète, les larmes sont l’offrande d’une âme en peine.