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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/161

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LA LUXURE DE GRENADE

ques-uns des faits que ces causes doivent inéluctablement engendrer.

Soleïman se balança longtemps de droite à gauche, si bien qu’Almazan put croire qu’il n’ajouterait plus un mot.

— Non. Tout est voilé. Il y a de grandes catastrophes. La volonté humaine peut toujours modifier ce qui paraît inévitable, mais elle est elle-même prisonnière des causes. Il y a des villes détruites et tellement de sang répandu ! Et ce ne sont pas seulement des corps, il y a bien des âmes qui périssent ! Le mal semble triompher. Je vois comme une marée sombre qui roule le fanatisme et l’ignorance. L’esprit recule et semble mourir. C’est l’effort spirituel de toute une race qui est anéanti. Et ce qui déclanche cet événement gigantesque c’est peut-être l’injustice commise sur une âme, dans une autre existence, par l’homme qui est derrière moi.

Soleïman avait laissé retomber sa tête en avant et il semblait ne plus vouloir parler davantage. Rosenkreutz s’était levé en silence et il fit signe à Almazan de le suivre.

Dehors la pluie avait cessé mais le vent soufflait en tempête. La ville des lépreux était déserte. Ils en sortirent et marchèrent vers Grenade. Mais Almazan ne se hâtait plus.

— Ai-je mal compris ce qu’a dit Soleïman, demanda-t-il ? Comment une action accomplie par moi dans une autre vie pourrait-elle avoir de si incalculables conséquences ?

— Le mystère des causes est impénétrable, dit Rosenkreutz. Une âme qui est déchue parce qu’elle a été