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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/170

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LA LUXURE DE GRENADE

Le Hagib soulevait parfois la tenture de la chambre où l’Émir marchait maintenant de long en large et d’autres fois c’était le muet Ali qui montrait son visage fidèle. Abul Hacen les renvoyait d’un geste impérieux.

Ah ! s’il avait su ! Il aurait examiné avec soin le dessin de ces bleus sur les cuisses bien-aimées. Il aurait peut-être reconnu une indéniable trace de doigts. Maintenant il était trop tard. Le temps avec son inlassable patience avait rendu aux jambes lisses leur blancheur parfaite.

Et soudain, Abul Hacen s’arrêta. Il tomba au milieu des coussins de son divan. Il avait les yeux exorbités et il mordit une étoffe pour ne pas hurler. Une pensée venait de naître dans son esprit, une pensée éveillant comme une flamme, une curiosité qui n’a plus de fin, une de ces curiosités amoureuses qui ne sont jamais rassasiées parce qu’elles se perdent dans le mensonge de la femme et dans le silence de l’homme.

Les bleus des cuisses étaient peut-être des morsures ! Ce n’étaient pas des mains, mais des dents humaines qui en avaient dessiné le contour avec la tendre fureur de la volupté.

Il ne le saurait jamais ! Il y a des détails qu’aucune bouche ne rapporte. Il y a un inviolable secret plus silencieux que le mystère de la mort. Le roi Ferdinand et la reine Isabelle pouvaient préparer une armée formidable tout à leur aise. Le duc de Medina-Sidonia venait de se réconcilier avec le marquis de Cadix, que lui importait ! Le sultan d’Égypte demandait cinq cent mille mitcals d’or en échange de son