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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/171

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LA LUXURE DE GRENADE

alliance, eh bien après ? Il n’y avait qu’un seul problème grave, immédiat, hallucinant. C’était l’origine de ces bleus sur les cuisses de sa bien-aimée, ces bleus qui étaient devenus noirs, puis qui avaient doré comme des raisins pour se perdre dans l’océan lunaire de sa peau, comme de mystérieuses barques chargées de luxure.

La vie est encore belle tant qu’il y a un doute. Mais la certitude est comme une plaine désolée où l’on n’aperçoit au loin que la tour noire de la vengeance.

L’Almocaden de la porte de la Loi avait reconnu l’eunuque et l’eunuque avait avoué dans la torture qu’il avait introduit Tarfé dans l’appartement d’Isabelle. Et le fait en lui-même n’était rien s’il avait gardé un caractère lointain, anonyme, mystérieux. Mais Abul Hacen connaissait d’autres choses plus affreuses.

Ce Tarfé, n’étant pas très intelligent, s’était vanté. Il avait donné certains détails et ces détails circulaient de bouche en bouche. Toute la famille des Almoradis se réjouissait de l’aventure.

— Quand il revient de l’Alhambra, il a les yeux battus jusqu’au menton, avait dit un des oncles.

— Le bouc a enfin trouvé sa chèvre, répétait sans cesse un autre dont la haine pour Abul Hacen était ancienne et très connue.

Abul Hacen se souvenait que cette famille des Almoradis ne l’avait jamais aimé. Elle était marocaine d’origine. Elle avait combattu son grand-père et malgré les avantages dont il l’avait comblée elle était