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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/172

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LA LUXURE DE GRENADE

restée sourdement hostile. Ah ! que ne s’était-il appuyé plutôt sur les Zegris. Ils étaient rigoristes c’est vrai, mais fidèles. La vertu, il le voyait bien, avait tout de même du bon et les souverains Almohades n’étaient pas si fous quand ils punissaient de mort les femmes qui marchaient dévoilées. Maintenant il était la fable de Grenade. Lui qui, quelques jours auparavant dans les rues de Zahara, avait fait l’admiration de ses soldats, n’était plus qu’un vieillard que la femme qu’il aimait trompait avec un jeune homme vigoureux. Il aurait mieux valu tomber du haut de la plus haute mosquée de Grenade.

Mais les détestables Almoradis allaient apprendre à le connaître !

D’abord, il allait poignarder Isabelle. Ensuite…

Isabelle ! La lumière de l’aurore ! Est-ce qu’il n’en était pas illuminé. Est-ce que ses prunelles ne se mouillaient pas, quand il faisait chanter les syllabes de son nom ? Et si elle l’aimait tout de même ? Il y a des femmes qui ont des caprices passagers. Elles les satisfont et elles reviennent avec plus d’ardeur à l’homme qu’elles aiment. Lui-même était ainsi. Les femmes, au fond, sont poussées par les mêmes instincts que les hommes.

Non, il ne tuerait pas Isabelle. Savoir dans quelle mesure elle avait aimé Tarfé, et se venger en même temps des Almoradis, tel était le problème et il avait pour le résoudre un moyen simple, aisé, ingénieux.

Il ne s’ouvrirait pas de son projet au Hagib. Cet homme avait un esprit assez borné et mesquinement fixé sur les intérêts du royaume. En outre, il avait laissé voir une monstrueuse indifférence pour la