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LA LUXURE DE GRENADE

nuscrits arabes et il se mit fébrilement à les déchiffrer. Il découvrit l’étendue du ciel. Vite, un de ses envoyés partit pour Malaga et acheta à l’émir de cette ville la plus grande lunette astronomique du monde, qui provenait du temps des khalifes Almohades et avait été jadis sur la Giralda de Séville. Il pensa trouver le moyen de faire de l’or et l’unité de la matière. De Fez, il fit venir un fourneau spécial, d’un poids considérable, pour la cuisson des métaux. Il fréta un navire à Valence et chargea un clerc d’aller rechercher en Orient un collège de Soufis syriens qui possédait, disait-on, gravée sur un bloc de cuivre, une copie de la fameuse table d’Émeraude d’Hermès. Il donnait de l’argent à tout venant pour des secrets chimériques, des découvertes insensées.

Ses serviteurs avaient ordre de ne jamais pénétrer dans les chambres où il travaillait et où on l’apercevait quelquefois revêtu d’une robe blanche et couronné d’une mitre étrange qui ne ressemblait pas à celle de l’église.

Les habitants d’Alcala murmuraient sourdement. Le soir, on allait jeter des pierres contre ses fenêtres. On parlait de sorcellerie et de nécromancie. Le cardinal de Mendoza, son ennemi personnel, avait écrit au pape à son sujet. Malgré cela, sa situation à la Cour était aussi puissante que jamais. Il avait été autrefois le confesseur de la reine Isabelle. Elle venait de manifester à plusieurs reprises le désir de ravoir auprès d’elle l’archevêque de Tolède auquel elle gardait son affection.

Il n’avait pas répondu à ses avances. Une nuit, sans prévenir personne, accompagné de son seul