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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/19

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LA LUXURE DE GRENADE

serviteur Pablo, il avait quitté Alcala, les livres, les lunettes, les fourneaux. Il était venu s’installer à quelques lieues de Séville, dans une demeure mauresque délabrée qu’il avait achetée secrètement quelque temps auparavant. C’était dans cette demeure qu’avait vécu le rabbin espagnol Aben Hezra, traducteur d’Alfergan, auteur d’un livre mystérieux sur l’origine du monde, dont ses contemporains avaient parlé et qu’on n’avait jamais retrouvé. Une vague légende prétendait que ce livre était caché depuis trois siècles dans sa maison.

Ajoutait-il foi à cette légende et voulait-il retrouver ce livre ? Avait-il quitté Alcala pour échapper à un danger qui le menaçait ? Aspirait-il seulement à la solitude ? C’est ce qu’Almazan s’était demandé quand il avait appris l’arrivée de l’archevêque, quelques jours auparavant.

La tête dans ses mains, il revoyait tous les détails de sa dernière visite à la demeure du rabbin Aben Hezra.

Il avait représenté au vieil archevêque qu’il ne pouvait continuer à habiter cette ruine dont les portes étaient branlantes et les fenêtres défoncées. Les routes étaient pleines de voleurs et Cantillana, le village le plus proche, était à une lieue de là. Plus que les voleurs, il devait craindre tous ceux qui, à la Cour, redoutant son retour possible dans la faveur de la Reine, avaient intérêt à sa mort.

Mais Alfonso Carrillo avait souri des craintes du