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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/225

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LA LUXURE DE GRENADE

— La mort après la torture attend celui qui restera. Je reste.

— Va, je te l’ordonne.

Et pendant qu’on descendait le coffre, le rabbin ajouta :

— C’est à Tibériade qu’est la confrérie la plus puissante. Rends-toi à Tibériade d’abord où Maïmonide est enterré. Mais si tu n’y trouvais pas Samuel Halévy, le talmudiste, et Abraham Alfassi, le commentateur de la Kabbale, va à Jérusalem où tu les rencontreras dans la grande université hébraïque. Là où il y a l’esprit il y a la racine de l’arbre.

Ils n’eurent que le temps de s’embrasser en se séparant. Mais ils ne se séparaient pas. La pensée de celui qui demeurait accompagnait celui qui partait.

Tant qu’il put le voir, Aboulfedia suivit des yeux la tache grise que faisait sur le quai le rabbin Anan ben Josué. Il était très petit, tout voûté, de plus en plus voûté. Lui en qui vivait un rêve énorme, il hésitait en marchant. Il trébucha, il n’en pouvait plus. Il avait perdu son bonnet noir. Il revint sur ses pas pour tirer par la bride les chevaux en sueur et il avait l’air d’un mendiant qui vient de les voler.