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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/256

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LA LUXURE DE GRENADE

comme représentant de la paix. Puis, partant des deux donjons, une vague de silence et de terreur gagna de proche en proche et s’étendit sur toute la ville.

Hamet el Zegri, qui occupait le château de Jebelfaro avec deux mille mercenaires marocains de la tribu des Gomeres, était descendu dans l’Alcazaba, entouré de ses soldats, aussitôt qu’il avait appris l’envoi de la députation. Il avait mis à mort l’Alcaïde comme traître à la cause des Maures et il s’était fait proclamer Alcaïde à sa place par le Conseil des marchands épouvantés. Maître de l’armée et des pouvoirs civils, il avait décidé la résistance à outrance.

Le peuple n’eut pas le temps de commenter cet événement. Des fanfares résonnèrent sur toutes les tours, coururent circulairement autour de la place. Une cavalcade dégringola sur les lacets des châteaux. Hamet el Zegri parcourut les rues de la ville, suivi de ses troupes en armes. Les mercenaires avaient des chevaux noirs de petite taille. Ils portaient des cuirasses pleines, en acier poli, des casques hauts avec des tringlettes busquées qui descendaient sur leur nez et enlevaient à leur visage l’apparence humaine. Leurs lances étaient étonnamment longues et ils les portaient toutes droites, en sorte qu’elle semblaient de jeunes arbres plantés dans le sol et leurs boucliers étaient des masses métalliques étincelantes dont ils se servaient pour écraser leurs ennemis. Derrière eux, sans armures, vêtus de cuir brun et n’ayant pour seule arme qu’un court cimeterre, venaient trois cents cavaliers de l’ordre religieux des Rabits. C’étaient des guerriers qui vivaient dans la médita-